LES CLOCHES AU TRIBUNAL
« La Gazette du Palais « , vous connaissez ? Rien à voir avec Paris-Match, Closer ou le Canard Enchaîné . C'est une publication sérieuse que les juristes de tous poils se doivent de lire . Disons que c'est plutôt rébarbatif pour le commun des mortels sauf...quand un éminent juriste de Lambersart y couche le fruit des ses réflexions .
Dans le n°du 15 décembre, Robert Hanicotte qui nous avait déjà gratifiés en 2010 de « L' Etat Pinocchio », un livre plein de verve sur le mensonge en politique, nous offre cette fois son analyse sur un sujet auquel on ne peut rester sourd : le contentieux relatif aux sonneries des cloches !
Est-ce le débat que nous avions eu à Lambersart quand des habitants de Canteleu avaient manifesté leur hostilité aux sonneries matinales de l'église St-Sépulcre qui l'a inspiré ?
Son article intitulé « Clochemerle au tribunal administratif » tout sérieux qu'il est n'est pas exempt d'allusions perfides sur d'autres bruits que nous connaissons bien dans notre commune : « les égosillements d'un coq de basse-cour narcissique de l'avenue...,les jappements lancinants d'un roquet de banlieue esseulé dans une autre avenue , sans oublier les balayeuses mécaniques qui sont autant de reveille-matin coalisés pour pourrir la vie d'un citadin déjà anémié ». Le ton, vous le remarquez , peut être ironique .
Je ne vais pas vous détailler les arguties juridiques développées par Robert Hanicotte qui montre que quand elles correspondent à la tradition, les sonneries de cloches sont légales bien que les tribunaux prennent de plus en plus en compte les nuisances sonores excessives.Mais je souhaite faire apprécier aux amoureux de la langue française (nombreux à lire ce blog) le style si agréable de notre concitoyen . Voici l'introduction de son article :
« Jadis, les cloches de nos églises berçaient la vie campagnarde. Dotées d'une voix d'airain, elles composaient l'aristocratie du bronze, dédaigneuses des sonnailles plébéiennes de la gent bovine. Las ! De nos jours,la musique carillonnante ne semble plus faire recette auprès des pavillons riverains. Les cloches d'aujourd'hui sonnent la discorde....Le premier magistrat de la cité ne sait plus à quel son de cloche se fier . Que l'édile s'abstienne d'agir et le voilà suspecté de prêter une oreille complaisante aux tenants de Quasimodo. Cherche-t-il à réglementer les sonneries litigieuses,il se retrouve soupçonné de vouloir imposer un silence de plomb. Au royaume de Clochemerle, ces picrocholines guerres de décibels résonnent en écho dans le prétoire. De plus en plus sollicitée ,la noblesse de robe doit arbitrer ces tintinnabulantes querelles de clochers.... »
Savoureux de finesse, n'est-ce pas ? J'espère ne pas avoir perdu trop de lecteurs en route... En tout cas voilà un beau texte pour le prochain concours de dictée des seniors de Lambersart...